LES THEORIES DE LA CROISSANCE FACIALE
I. Introduction
- Les théories de croissance servent de guide aux concepts thérapeutiques. Comprendre
comment se modèle la face permet d'obtenir les clés et les stratégies de traitement.
- La programmation génétique est essentielle dans la détermination des formes et des
rythmes de croissance. L’influence du milieu modifie cependant, dans des limites assez
larges, le développement du programme génétique.
II. Historique
- 1803 : LODER et 1832 : BOURGERY, notent l'importance de la forme des os et leur
relation avec les fonctions ;
- 1809 : LAMARK et son principe phylogénétique : "la fonction crée l'organe" ;
- 1882 : les théories de ROUX et WOLFF : C’est "l'excitation mécanique fonctionnelle
qui donne sa forme à l'os. Toute modification dans l'intensité la direction des forces tend à
modifier à la fois la forme extérieure de l'os et son architecture interne" ;
- Plus généralement il a existé une lutte entre les partisans de l'hérédité et ceux de
l'environnement courant génétique et courant fonctionnel ;
- Aujourd'hui, il existe un accord sur 1 mécanisme plurifactoriel.
III. Théories explicatives de la croissance faciale
Il existe des approches génétique, fonctionnelle et mixte ou synthétique.
III.1 Le courant génétique
- Les facteurs génétiques ont un rôle dominant dans l'expression de la forme. Les tissus
adjacents et l'environnement ne peuvent influencer durablement la forme donc exclue tout
effet à long terme de l’orthopédie dento-faciale ;
- Paradoxalement, les pères de la thérapeutique fonctionnelle Pierre ROBIN (1902 : il
définie sa méthode morphologique afin de rétablir une morphologie harmonieuse par la
normalisation des fonctions : traitement du syndrome de ROBIN) et ANDRESEN en
étaient membres. Le but thérapeutique était de faire de l'eumorphie pour le premier et pour
le second, de laisser s'exprimer en totalité « dans le cadre d’un optimum individuel
fonctionnel et esthétique » les potentiels de croissance sous dominance génétique ;
- BROADBENT (1937) (point R) et BRODIE (1942 et 1946) (axe Y) : stabilité ++ de la
direction de croissance ;
- BRODIE (1946) : "La croissance de la face est proportionnée. Ceci veut dire que la
dysmorphie, lorsqu'elle existe, est présente avant la naissance, elle ne peut être changé par
le traitement. Les dents et les procès alvéolaires constituent la seule zone de la face où l'on
peut espérer des modifications" ;
- Théorie de WEINMANN et SICHER (1955) :
- Dans leurs schémas, les sutures de la face adoptent une même orientation dont le
résultat est de provoquer une croissance faciale rayonnante et homothétique en bas et
en avant ;
- Ces sutures sont des syndesmoses et sont au nombres de 4 : fronto-maxillaire,
maxillo-malaire, temporo-malaire et ptérygo-palatine, avec la prédominance de la
suture fronto-maxillaire de par sa position stratégique, à la jonction du crâne et de la
face ;
- Ces auteurs accordent un rôle majeur aux facteurs génétiques intrinsèques qui
contrôlent l‘activité des sutures, qui sont des centres actifs et autonomes à potentialités
génétiques de croissance et de régulation de croissance ;
- Elles ont le même rôle que les cartilages de croissance des os longs ;
- A ce rôle moteur s‘ajoute les phénomènes d‘apposition résorption ;
- Tous les tissus ostéogènes ont la même importance et le même mécanisme de
contrôle donc pas de hiérarchie des sutures qu'elles soient synchondroses ou
syndesmoses;
- Cependant De nombreux travaux ont démontré les erreurs de ces auteurs; ainsi :
1) MULLER a définie des variations de vitesse entre les différents points du
massif facial, ce qui rend impossible la conservation de l'homothétie de
croissance ;
2) BORK a démontré que le déplacement des structures se faisait selon
des trajectoires courbes ;
3) KOSKI puis PETROVIC ont révélé l'absence de potentiel de croissance de
ces sutures.
- Malgré toutes ces erreurs, le rôle de la composante génétique de la croissance ne peut
être nié.
- Théorie de SCOTT (1953) :
- Les cartilages présentent une croissance propre, interstitielle et sont les sites de
croissance primaire ;
- Pour SCOTT, le cartilage septal est un site privilégié : La croissance du septum
nasal agirait comme un moteur tractant le maxillaire en avant par l’intermédiaire du
ligament de LATHAM ( ! il disparaît à la naissance => controversée) ;
- Les sutures de la face n’ont qu’un rôle compensateur ;
- Il existe une différenciation, une dépendance hiérarchique entre les tissus ostéogènes
:
- Il existe des centres de croissance Ir : les synchondroses : cartilages sont
dominants, moteurs, réglés par des FGI ;
- Il existe des centres de croissance IIr : les syndesmoses : dominées et
adaptatives. Sans potentialités de croissance indépendante. Rôle passif de
remplissage.
- La croissance se fait en 3 étapes :
- 1) de 0 à 2.5 ans : au niveau des centres de croissance (cartilages, …) :
- sens sagittal : synchondroses sphéno-éthmoïdale, intra-
sphénoïdale et occipitale postérieure ;
- sens transversal : synchondroses sagittales.
- 2) de 2.5 et 7 ans : au niveau des sites de croissance (syndesmoses, …) :
poussée en avant du système péri-maxillaire par le septum nasal suivi du
colmatage par les syndesmoses ;
- 3) après 7 ans : remodelage exclusif.
- Théorie de KOSKY :
- A partir d’expériences de transplantation cartilagineuse montrant le potentiel de
croissance des cartilages et d’exérèse suturale sans perturbation de la croissance, il tire
des conclusions sensiblement égales à celle de SCOTT :
- Les synchondroses sont des centres de croissance primaire ;
- Les syndesmoses ne sont que des sites de croissance secondaire.
III.2 Le courant fonctionnel
- Il suit la théorie de MOSS : 1ère place à l'environnement non squelettique dans les
facteurs responsables de la croissance ;
- Elle est née en 1968 d’une observation clinique : malgré une double condylectomie chez
une fille de 7 ans, poursuite de la croissance verticale, antéro-postérieure et transversale
ainsi que la maturation dentaire complète ;
- Cette observation a contredit l’hypothèse selon laquelle, le condyle était le site le plus
important de la croissance mandibulaire. De là, MOSS décrit la tête comme une structure
composite destinée à remplir différentes fonctions indépendantes : intégration nerveuse,
équilibration, vision, respiration, olfaction, audition, phonation, mastication, déglutition,
digestion qui sont chacune assurées par une composante cranio-faciale formée de 2
parties : matrice fonctionnelle et unité squelettique ;
- Le postulat : taille, forme, position et permanence de chaque unité squelettique ne sont
qu'une réponse secondaire compensatrice et obligatoire à la demande de protection et/ou
de soutient mécanique de sa matrice fonctionnelle (1968). La matrice grandit, le squelette
répond (1971).
- Selon lui, la croissance faciale est donc le résultat à la fois d’une translation dans
l’espace (MFC passive) et d’un remodelage osseux adaptatif (MFP active).
III.3 Le courant synthétique
- Il prend un peu des deux et détermine la part de responsabilité de chacun ;
- VAN LINBORGH : Travaux expérimentaux sur des embryons d’amphibiens et de
poulets (1970 et 1983). Père de la théorie multifactorielle de la croissance faciale. C’est la
théorie synthétique ou de consensus (LAUTROU 1994) ;
- Il a livré une classification des facteurs responsables de la croissance (3 familles, 5
groupes) :
1) Facteurs génétiques intrinsèques :
Génétiquement déterminés ;
Agissent à l'intérieur de la cellule ;
Déterminent les potentialités des cellules ;
Ils correspondent aux gènes architectes (cf. cours facteurs de croissance).
2) Facteurs épigénétiques :
Génétiquement déterminés ;
Agissent à l'extérieur de la cellule ;
Ils peuvent être soit :
Locaux (structures adjacentes) : Induction au cours de l’embryogenèse,
… ;
Généraux (structures éloignées) : Hormonaux (hormones
hypophysaires), …
3) Facteurs environnementaux :
Extérieurs à la cellule ;
Ils peuvent être soit :
Influence locale : ligaments, tendons, muscles, t. mous, dents, espaces
fonctionnels… ;
Influence générale : vascularisation.
- Les catégories de facteurs y interviennent et leur responsabilité est modulée en fonction
du stade de développement : facteurs génétique et épigénétique agissent très tôt, les autres
plus tard ;
- Il a tenté de pondérer l'influence de ces différents facteurs sur les difrents types de
croissance. Selon lui :
- La croissance enchondrale est presque exclusivement dépendante des FGI. Sa
direction pend faiblement des facteurs épigénétiques ;
- La croissance membraneuse dépend surtout des facteurs épigénétiques locaux.
- Certains facteurs sont stimulants (cartilage du crâne sur la croissance membraneuse) ;
- D'autres facteurs sont conditionnant (action conditionnante passive de l'orbite sur l'œil) ;
- Opposition entre MOSS et Van LIMBORGH :
- MOSS classe les muscles dans les facteurs épigénétiques alors que VAN
LIMBORGH en fait des facteurs environnementaux ;
- MOSS pensent que les os et cartilages ont les mêmes influences mais que les seuils
de réactions différentes, ils dépendent de facteurs systémiques. Pour VAN
LIMBORGH, les cartilages de la base du crâne sont contrôlés génétiquement mais
leurs positions et leurs formes sont directement dépendantes de facteurs épigénétiques.
IV. Approche descriptive de la croissance faciale
IV.1 Les travaux de BJORK
- Parti du fait qu'il n’y a pas de croissance interstitielle de l’os, BJORK a eu l'idée,
en 1955, d’implanter profondément dans les choires des pointes de tantale pour servir
de repères fixes. Grâce à ce référentiel stable, il devient possible d’observer comment les
os évoluent, dans leur forme, leur volume et leurs rapports avec la base du crâne. Ainsi est
née la méthode des implants ;
- ! : Le mot matrice est différent selon les auteurs :
pour MOSS : à un ensemble de structure et de fonctions qui vont stimuler la
croissance. Ex. l’œil grandit et provoque la croissance de la région orbitaire ;
pour BJORK : il écrit : « Le corpus osseux de la mandibule et ses tissus de
recouvrements, la matrice, sont considérés comme un système indépendant de
tissus capable de rotation indépendante ».
BJORK (1967) :
Superposition sur le sphénoïde :
25% rotation antérieure ;
25% rotation postérieure ;
50% rotation neutre.
3 groupes à la base de sa classification typologique.
Superposition sur les lignes implantaires :
Rotation antérieure : condyle en haut et en avant ;
Rotation postérieure : condyle en haut et en arrière ;
Rotation neutre : condyle en haut.
SKIELLER et BJORK (1983) :
1) A la mandibule :
o Rotation totale : ligne implant / base du crâne ;
o Rotation matricielle : ML / base du crâne ;
o Rotation intra-matricielle : ligne implant / ML.
Par ailleurs,
La rotation totale = rotation matricielle et intra-matricielle ;
La position du centre de rotation se situe dans le corpus. Il est la
résultante des 2 autres centres.
2) Au maxillaire :
- Les rotations sont limités mais existent. En général, elles sont du même
sens qu’au maxillaire.
- Pour BJORK et SKIELLER : le développement des tissus mous et de l'os sont
indépendants. Sens et intensité peuvent être différent. Le résultat clinique est la
confrontation entre ces 2 entités, à l'interface périostée (remodelage).
IV.2 Les travaux de PETROVIC
- Connus depuis 1967, les travaux de PETROVIC ont été conduits essentiellement sur
l’animal de laboratoire (le rat) et en culture organo-typique ;
- Ils ont pour objet d’examiner l’action des forces ou de facteurs biochimiques sur le
potentiel de croissance propre du cartilage condylien du rat ;
- Cela a conduit à l’élaboration du fameux "schéma cybernétique" des facteurs de
croissance ;
- A la mandibule :
La croissance est due à une double contribution :
périostée (la plus importante) ;
cartilagineuse.
Le couple somatotrope-somatomédine agit positivement sur le cartilage
condylien, lui-même contrôlé par le ptérygoïdien latéral ;
Les signaux d’écart générés par l’intercuspidation dentaire lorsque les deux
arcades ne sont plus ajustées parfaitement du fait de la croissance font varier la
tension du frein méniscal postérieur et du ptérygoïdien latéral pour réguler la
croissance condylienne ;
(Pour PETROVIC, la croissance s’effectue non dans les chondroblastes mais dans
les pré-chondroblastes. Il est donc possible d’obtenir un allongement de la
mandibule dans les syndromes de cl. II.).
- Au maxillaire :
L’action directe du couple somatotrope-somatomédine agit sur la croissance du
cartilage septal (cartilage de type I).
- Par ailleurs, ils démontrent qu’il est possible d’obtenir un supplément de croissance
condylienne par les activateurs ;
- Ces résultats sont en contradiction avec les travaux de BJORK (et d’autres) qui n’ont
jamais prouvé la possibilité de moduler, par des forces orthopédiques, la croissance du
cartilage condylien ;
- Recherches sur la croissance de la mandibule :
- A partir de cultures organo-typiques de divers cartilages et ce dans le but d’étudier
les potentiels de croissance du condyle isolé en comparaison avec d’autres cartilages
(Meckel, épiphysaires) ;
- Par l’emploi chez le rat de thérapeutiques orthopédiques :
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