L`historien et les mémoires de la Seconde guerre

Thème 1 Le rapport des sociétés à leur passé
Chapitre 1 :
L'historien et les mémoires
de la Seconde guerre mondiale
Environ 4-5heures consacrées au temps du programme d'histoire
Objectifs de la séquence:
- Cerner le travail de l’Historien qui interroge les mémoires
Problématiques :
La question des mémoires de la Seconde Guerre mondiale est désormais de plus en plus
dans l’histoire et, tout en conservant d’immenses enjeux politiques et éthiques, elle se libère
des enjeux liés aux acteurs survivants et politiquement actifs.
En quoi le contexte d’élaboration des mémoires étudiées les a-t-il déterminées (construction des
mémoires) ?
Quelles mémoires de ces conflits peuvent être identifiées au sein de la société française
(multiplicité des mémoires) ?
Comment, dans quels rythmes et dans quelles perspectives les historiens ont-ils fait de ces
mémoires des objets d’histoire (historicisation des mémoires) ?
PIÈGES À ÉVITER
- Réifier et déifier la Mémoire, alors que seules existent des mémoires.
- Confondre la démarche historique avec un « devoir de mémoire ».
Aligner le raisonnement historique sur les discours et les projets d’un groupe particulier et de
sa mémoire, c’est à dire confondre une mémoire avec l’histoire.
Confondre le débat historiographique avec un débat éthique ou moral produisant la
stigmatisation sans nuance de tels ou tels acteurs.
Produire un discours sans nuance de stigmatisation des mémoires sans voir le rôle qu’elles
jouent comme matériaux, sources pour l’historien et comme facteur d’intégration des sociétés.
Histoire des arts
Le cinéma est le grand art des mémoires : il en a les vertus et les vices. Il ne renseigne guère sur son
sujet déclaré, mais bien plus sur le discours qui est tenu par ses auteurs sur ce sujet, et tout
autant lorsqu’il prend la forme documentaire. Comme tel, il constitue une remarquable source pour
identifier les mémoires et parcourir un itinéraire de leur histoire.
Ainsi, et pour les mémoires de la Seconde Guerre mondiale, la Bataille du rail (René Clément,
1946), film de commande qui correspond à la période d’héroïsation de la Résistance ; Nuits et
brouillards (Alain Resnais, 1955) qui participe à la construction de la mémoire publique de la déportation
en limitant son récit à celle des résistants et des politiques ; le Chagrin et la pitié (Marcel Ophuls, 1969),
déconstructeur de l’héroïsation et reçu, contre le projet de son auteur, comme révélateur de l’indignité
générale de la population française devant l’occupation ; Shoah (Claude Lanzmann, 1985) qui témoigne
de et concoure à l’arrivée sur la scène publique de la mémoire de la persécution des Juifs et du génocide.
La filmographie est très large et bien d’autres oeuvres peuvent servir de support à une réflexion
historique sur leur place dans l’évolution des mémoires : Paris brûle-t-il ? (René Clément, 1966) ; l’armée
des ombres (Jean-Pierre Melville, 1969) d’après le roman de Joseph Kessel (1943) ; Lacombe Lucien,
(Louis Male, 1974) ; Monsieur Batignole (Gérard Jugnot, 2002) ; un Village français (Lucien Triboit,
2009, série télévisée).
Pour aller plus loin
- Paxton Robert, La France de Vichy, Paris, Seuil, 1973
- Rousso Henry, Connan Eric, Vichy, un passé qui ne passe pas, Fayard, 1994. Réédition augmentée, Coll.
Folio, Gallimard, 1996
- Douzou Laurent La Résistance française, une histoire périlleuse, Seuil, 2005
- Laborie Pierre, Le chagrin et le venin, La France sous l’Occupation, mémoire et idées reçues, Bayard,
2011.
Aides à l’élaboration de la séquence :
- Site de l’académie de Lyon
- Valentine Rousseau.
Introduction:
Accroche: cours dialogué sur:
la définition de la mémoire en histoire.
Comment et pourquoi est-elle sollicitée et célébrée? Exemples?
Comment définiriez-vous la discipline historique?
Reconstruction et analyse savante des évènements du passé qui vise à être objective et à faire
comprendre le passé avec un recul critique.
Quels défis se pose à l'historien face au devoir de mémoire existant dans la
société?
La question des mémoires de la Seconde Guerre mondiale est désormais de plus en plus dans
l’histoire. D'ailleurs cette année n'a t-on pas fêté les 70 ans de la libération de Paris ou des
débarquements en Normandie et en Provence?
Mais qu'est ce que la mémoire?
En histoire, elle désigne le vécu d'évènements par des individus ou des groupes d'une nation.
Elle est ainsi subjective, émotionnelle et sélective. Par conséquent la mémoire est un processus
de reconstruction ou d'appropriation du passé à partir de la représentation que fait une nation
de ce passé et de ses intérêts actuels (Maurice Halbwachs, sociologue allemand, 1950)
Les mémoires de la Seconde Guerre mondiale sont surdéterminées par le traumatisme
considérable qui en a sulté pour la population française. La défaite totale de 1940, perçue plus
ou moins comme honteuse, l’armistice, la collaboration, la guerre civile, les persécutions de
nombreuses victimes politiques ou raciales ont fait douter le pays de lui-même et de sa capacité
morale à affronter son destin. Ni l’action de la France libre et de la Résistance, ni la victoire,
obtenue grâce à des alliés infiniment plus puissants, ni l’épuration à la fois douteuse dans la
violence des premières semaines et partielle dans les mois et années qui suivirent n’ont suffit à
laver cette blessure pour les générations qui avaient vécu directement la guerre ou pour celles
dont les récits familiaux en faisaient une vivante expérience.
Problématiques:
Comment se construit, dès la Libération une mémoire officielle de la Seconde
Guerre mondiale en France?
Comment les mémoires de la Seconde Guerre mondiale se manifestent-elles
depuis les années 70 ?
I/ Le temps de la mémoire du « résistancialisme »
(1945-1970)
A- Idéalisation et mythification d'une France résistante
Démarche:
projection du film de René Clément, La Bataille du rail
Capacités:
Analyser une oeuvre cinématographique en la replaçant dans son contexte historique
Critiquer l'image
Notion : sistancialisme - résistantialisme
Activité sur le fil de René Clément: La bataille du rail
(doc.1 page 66 Hachette à coller sur la fiche activité)
Questions:
1- Quels messages sur la Résistance et la corporation des cheminots pendant la
guerre, le film et son affiche veulent-ils faire passer?
Pour rappel, les cheminots furent sollicités par les mvts de la Résistance afin de devenir
des saboteurs, informateurs, transporteurs de la presse clandestine.
Commandité à la fois par une coopérative proche du PC et par le mouvement Résistance-
Fer, le film montre d'abord que les cheminots - la classe ouvrière - furent admirables, puis que
leurs supérieurs, et donc la SNCF tout entière, ne l'étaient pas moins. Fantasme d'une France où
tout le monde aurait été résistant, oubli des convois qui emmenèrent les Juifs vers les camps de
la mort. Peut-on parler de propagande ?
2- En quoi le film a-t-il une dimension idéaliste ?
La genèse de sa création est amplement révélatrice des enjeux et des ambiguïtés qui
environnent ce projet artistico-patriotique. Il est le point d’aboutissement d’une double
logique dont les intentions transparaissent à travers la construction même du film. La
convergence de deux groupes de commanditaires distincts se traduit en effet par la
juxtaposition, à l’écran, de deux discours de glorification réunis sous le patronage
consensuel du CNR. Satellite du PCF, la Coopérative générale du Cinéma Français de Jean-
Paul Le Chanois qui produit le film a l’ambition de célébrer l’héroïsme de la classe
ouvrière à travers la métaphore prolétarienne emblématique du peuple cheminot. Pour
leur compte, l’association des anciens membres du réseau Résistance-Fer et la SNCF, qui
consent un généreux soutien technique, entendent valoriser une vision patriotique et
résistante de leur entreprise, redorant ainsi le blason d’une firme qui n’a guère résisté,
contrairement à nombre de ses agents.
Il en résulte un hymne unanimiste à la famille cheminote soudée dans la lutte : ingénieurs
et régulateurs, machinistes et mécaniciens, chefs de gare et aiguilleurs, tous, jusqu’aux
cheminots à la retraite, s’engagent du même élan. Dans ce climat de solidarité
professionnelle et patriotique instantanée, pas de traitre ni d’agent double, aucun lâche
ni dénonciateur… et pas non plus le moindre convoi de la déportation
3- Quels sont les procédés utilisés par le réalisateur pour rendre son oeuvre
réaliste?
Ce film appartient au courant du réalisme qui pose pour principe que l'oeuvre d'art doit
reproduire le réel avec le plus de précision possible.
Ainsi les personnages doivent adopter un langage crédible, courant en fonction de leur
appartenance sociale, culturelle. Ils évoluent dans des décors naturels.
Ici le réalisme repose sur la description précise du travail quotidien des cheminots (geste,
vêtements, conduite des trains..) et sur celle de leur action résistante (sabotage des voies ferrées
par exemple).
A noter que la 1ère partie du film = forme de documentaire (constituée par le court-
métrage : Résistance-fer) renforçant la dimension réaliste de cette fiction.
Synthèse:
CF II / A- La mémoire du résistancialisme (ancien programme)
La France meurtrie de la Libération avait besoin de mythes. Le cinéma satisfait ce besoin
à l'image de « La bataille du rail ». Doublement consacrée au premier festival de Cannes en
1946, ce classique du cinéma français magnifie la Résistance cheminote et s’impose comme
l’emblème cinématographique du mythe résistancialiste.
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