Cellules souches embryonnaires – La Croix du 4 sept. 2005
Les cellules souches embryonnaires peuvent s’obtenir par destruction d’un embryon
in vitro qui en général faisait initialement l’objet d’un projet parental. La loi française
d’août 2004 prévoit ainsi d’utiliser les embryons surnuméraires congelés et les
détourne de leur finalité procréatrice initiale. Il s’agit là d’un pas vers une
instrumentalisation niant la spécificité d’être humain en puissance. L’Eglise catholique
a raison d’insister sur le nécessaire respect dû à cette vie humaine en devenir, quand
bien même elle ne l’identifie pas à une personne humaine (Donum vitae) et n’enterre
pas les fausses-couches… Sur le plan théologique, de fait, il ne saurait y avoir de
stade de « non-droit » : toute l’existence humaine porte le sceau de la dignité divine.
Les cellules souches peuvent aussi – au moins théoriquement – provenir de ce
conglomérat cellulaire issu de la division d’un ovocyte après substitution de son
noyau par celui d’une autre cellule sans qu’il y ait eu fécondation (« clonage
thérapeutique »). Les questions sont alors cruciales : est-on ou non en présence d’un
être humain (réalité ontologique) quand on manipule des cellules sans qu’il y ait eu
fécondation ? quand la finalité motivant l’acte n’est pas la procréation mais la
production de cellules dans une perspective thérapeutique ? Certains pensent que
non, arguant d’une différence de nature entre une cellule reproduisant à l’identique un
patrimoine génétique et un embryon porteur d’un croisement de patrimoine
génétique. D’autres estiment que la présence d’une potentialité de personne quand
bien même elle ne peut être révélée que par l’implantation utérine, permet de
conclure que l’embryon et la cellule souche partage une même réalité ontologique.
Mais quand commence alors cette vie humaine proprement dite ? Dans la première
situation, la fécondation même si elle n’est pas l’affaire d’un instant mais de 24-48H,
reste un seuil décisif. En cas de manipulation intracellulaire, la question est d’autant
plus redoutable que demain les ovocytes seront eux-mêmes fabriqués1 ou ne seront
plus nécessaires car l’on apprendra à « réinitialiser » des cellules différenciées…
Seront-elles encore totipotentes au point d’être aussi potentialité de personne ? Nul
ne le sait aujourd’hui. Et comment dès lors gérer juridiquement cette question ?
Le respect auquel invite l’Eglise ne clôt donc pas le discours éthique, d’autant moins
que les frontières se fluidifient jusqu’à l’indécidable, que l’on n’est pas dans le « tout
ou rien », que le temps appartient à la réalité humaine, l’enracinant en de complexes
méandres.
1 Cf. Travaux des équipes H.R. Schöler/G. Fuhrmann en 2003 ; J.L. Tilly et J. Johnson en 2004.
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